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Jean Aitcheson a effectué 37 voyages humanitaires dans 10 pays
Par Jean Aitcheson
29 janvier 2024
Utilisé avec l’autorisation de Jean Aitcheson
Lors d’une récente mission en République dominicaine, Jean Aitcheson a participé à la distribution de brosses à dents à des enfants dans le cadre d’une initiative en faveur de l’hygiène bucco-dentaire.
Note de la rédaction : Jean Aitcheson est une infirmière exemplaire qui a consacré sa vie à l’action humanitaire mondiale et a reçu de nombreux prix pour son dévouement à aider les personnes dans le besoin. infirmière canadienne remercie Lynda Younghusband d’avoir réalisé cet entretien avec Jean Aitcheson au début de l’année.
Vous avez effectué 37 voyages humanitaires dans 10 pays, la plupart du temps en tant que chef d’équipe. Qu’est-ce qui vous a inspiré à entreprendre ce travail?
Lorsque l’occasion s’est présentée en 1995, je travaillais à temps plein et j’enseignais les soins infirmiers à temps partiel. J’aimais ces deux rôles. Je voulais transmettre mes connaissances et mes compétences à un pays en développement et partir à l’aventure vers l’inconnu.
Pourriez-vous nous parler brièvement d’un voyage qui vous a marqué?
Mon premier voyage a duré 40 heures, d’abord dans un petit avion, à cinq personnes dans un espace pour trois sans ceintures de sécurité, puis dans un canot pour un parcours de trois heures sans gilet de sauvetage. Notre objectif était d’évaluer la santé des Autochtones d’un petit village de la jungle amazonienne. À notre arrivée, nous avons appris qu’une épidémie de dengue hémorragique s’était déclarée.
Nous avons dormi dans une tente installée sur un sol en béton. La salle de bain (latrines) était un trou creusé dans le sol vers lequel nous marchions chaussés de bottes en caoutchouc pour nous protéger des serpents venimeux. C’est à contrecœur que, lors de ma première nuit, j’ai enfilé ces bottes et, à l’aide d’une lampe de poche, je me suis rendue aux latrines. Mais j’étais heureuse de m’être aventurée hors de la tente. Je n’oublierai jamais le moment où j’ai levé les yeux vers le ciel; la Voie lactée ressemblait à un énorme pinceau que l’on aurait trempé dans de la peinture blanche et qui aurait balayé le ciel. Alors que je restais là à contempler ces étoiles, j’ai entendu un grattement de guitare, un tambour, le tintement de perles fabriquées à partir de coquilles de noix, puis des chants, alors que tout le village se réveillait et entamait son heure de prière quotidienne.
Les gens marchaient pendant des heures à partir d’autres villages pour atteindre la clinique en plein air. Durant l’attente, les femmes faisaient la toilette les unes les autres, puis des enfants, en extrayant les poux des cheveux et en les mangeant! En trois jours, nous avons traité des taux faibles d’hémoglobine, des infections urinaires, des douleurs musculo-squelettiques, le paludisme, des vers intestinaux et des parasites. Je pouvais entendre le crépitement des vers dans l’abdomen des personnes qui se plaignaient de douleurs abdominales.
L’eau est arrivée par camion et a été déversée dans des barils de 40 gallons le long de la route. Elle est vite devenue contaminée. Les gens survivaient au moyen de denrées qu’ils pouvaient récolter dans la jungle, mais pas de légumes verts, d’agrumes et très peu de protéines.
Utilisé avec l’autorisation de Jean Aitcheson
Jean Aitcheson se dit fière de voir le drapeau canadien aux côtés de celui de la République dominicaine à l’extérieur du centre de soins, où des traitements étaient offerts dans le cadre d’une mission médicale.
Pouvez-vous nous donner un aperçu de l’organisation et du travail en jeu au préalable et une fois à destination?
L’organisation d’une équipe est énorme. Tout d’abord, il faut avoir un contact et un groupe ou une organisation à destination qui accepte d’accomplir les gestes suivants : rechercher environ sept communautés dans une région donnée pour organiser une clinique d’une journée et me communiquer leurs besoins; trouver l’hébergement, le transport, des tables et des chaises, de l’eau potable et de la nourriture; commander les médicaments nécessaires; confirmer la possibilité de recevoir des transferts d’argent; et s’informer des règles locales relatives à une équipe internationale. Il est indispensable de maintenir des communications fréquentes!
Pendant ce temps, chez nous, nous devons nous occuper de trouver un organisme de bienfaisance enregistré qui voudra bien parrainer la cause et accepter les dons destinés à payer les coûts du voyage et à recruter les membres nécessaires à une équipe médicale (médecins, infirmières et infirmiers, pharmacien ou pharmacienne, physiothérapeute et optométriste), ainsi que de nombreux adjoints pour administrer des traitements au fluor aux enfants, effectuer des examens et distribuer des lunettes de lecture et procéder aux analyses en laboratoire, et aider à contrôler les foules.
Il s’agit d’une équipe de 20 à 24 personnes. Nous devons établir un budget, y compris les coûts que chaque membre de l’équipe devra payer, et organiser les vols et le transport des personnes et des sacs de hockey à destination et en provenance de l’aéroport. Nous devons préparer le matériel et dresser des listes et emporter ce qui est nécessaire : des fournitures pour le soin des plaies, les soins par cathéter et les petites interventions chirurgicales; une trousse pour les soins prénatals; des trousses d’évaluation pour chaque membre du personnel infirmier et le médecin; des trousses d’évaluation pour les diabétiques; des trousses d’évaluation pour les laboratoires; des traitements intraveineux pour les urgences; et des trousses d’évaluation pour les frottis vaginaux (tests de PAP) si un laboratoire est disponible. Nous devons commander les articles nécessaires, comme les lunettes de lecture, le fluorure dentaire, les antibiotiques, les vitamines et autres médicaments qui ne sont pas disponibles.
Tous les articles doivent être consignés dans un manifeste pour les douanes. Il faut ensuite superviser l’emballage de 50 à 70 sacs de hockey, chacun devant peser 49,5 livres; organiser des collectes de fonds pour payer les articles nécessaires et des réunions d’information pour l’équipe; attribuer les sacs de hockey que chaque personne portera (seuls les professionnels sont responsables des sacs de hockey contenant des médicaments); et désigner les colocataires.
Une fois dans le pays, on demande à l’équipe de déballer toutes les fournitures afin qu’elles soient facilement accessibles, puis de se préparer pour le premier jour en clinique. Je rencontre le groupe d’accueil pour obtenir des détails sur les sites de la clinique, et je fais parfois des visites sur place. On affecte les personnes à des équipes de travail et à des tâches, en les changeant si nécessaire et en donnant à chaque membre de l’équipe une expérience stimulante et enrichissante. On organise des réunions d’équipe et des comptes rendus afin de déstresser et de faire part des expériences avec tous les membres de l’équipe.
Vous avez travaillé comme infirmière pendant 53 ans, élevé deux fils, participé au bon fonctionnement d’une grande ferme et été membre actif de plusieurs organisations communautaires ainsi que de tous ces voyages humanitaires. Faites-nous part de votre secret pour mener une vie aussi active et productive.
Je suis triste de dire qu’il m’est arrivé de négliger ma famille. Mes beaux-parents vivaient de l’autre côté du chemin et ont été d’une grande aide. Je n’ai jamais eu le temps de regarder la télévision et je n’ai pas de temps pour les médias sociaux. Tout est planifié sur un calendrier. Lorsque je travaillais à temps plein et que j’avais de nombreuses responsabilités professionnelles et en tant qu’infirmière, je devais laisser tomber les activités sociales. Le travail passait toujours en premier. Heureusement, je suis forte et en bonne santé. En 40 ans de carrière à temps plein, je n’ai pris que 30 jours de maladie.
Les expériences que j’ai vécues en tant qu’infirmière, enseignante, syndicaliste et missionnaire humanitaire, en plus d’élever une famille, de m’occuper de mes petits-enfants et d’être membre actif du Club Rotary, ont été dans tous les cas stimulantes et immensément valorisantes sur le plan personnel pour une vie bien remplie.
J’ai eu le privilège de recevoir plusieurs prix au cours de ma carrière. Je les dois à la promotion de 1964 de l’Hôpital d’Ottawa, Campus Civic, auprès de laquelle j’ai reçu une excellente formation d’infirmière; à ma famille qui m’a soutenue; à tous mes patients et mes étudiants; aux nombreux membres de l’équipe avec lesquels j’ai collaboré, dont les nombreux bénévoles qui travaillent avec moi; aux personnes qui répondent en donnant des fournitures; et aux personnes et organisations qui les envoient là où elles sont nécessaires dans le monde. Ils ont tous contribué à faire de moi la personne que je suis, apparemment digne d’être nommée membre de l’Ordre du Canada.
Jean Aitcheson a été nommée membre de l’Ordre du Canada en 2002. Elle a également reçu la Médaille du jubilé d’or de la Reine Elizabeth II (2002), a été nommée Stratford Woman of the Year in Health and Wellness (2014), a reçu le prix Rotary Service Above Self Award (2017), le prix Stratford Senior Citizen of the Year (2022) et le Prix d’excellence de l’Ontario pour les personnes âgées (2022).
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